Aujourd’hui nous allons mettre en lumière un important projet de R&D que vorteX-io mène depuis la fin de l’année 2022 pour le compte de l’Agence de l’eau Adour-Garonne et en collaboration avec le CNES et l’OFB (Office Français pour la Biodiversité).
L’objectif de ce passionnant projet de Recherche et Développement pour l’environnement consiste à développer des méthodes innovantes de mesures de la qualité de l’eau des cours d’eau et réseaux hydrologiques.
Nous sommes donc très heureux·ses de vous annoncer que les futures micro-stations du réseau vorteX-io seront dotées de fonctionnalités inédites leur permettant de mesurer par télédétection et en temps réel deux paramètres essentiels à la qualité de l’eau :
• la température de surface
• la turbidité
Mesure de la température des cours d’eau
Parmi les différentes métriques mesurées dans le domaine de la qualité de l’eau, la température de l’eau est une des plus importantes. Il s’agit en effet d’un facteur-clé de l’habitat et du métabolisme des espèces aquatiques et donc de la biodiversité des zones humides en général. Certains organismes aquatiques ont des exigences de température spécifiques pour leur reproduction, voire leur survie. De ce fait, une élévation de la température peut affecter directement leur croissance et leur développement et par là même des pans entiers de la chaine alimentaire de ces écosystèmes fragiles.
La température de l’eau a également un impact significatif sur la quantité de gaz dissous dans l’eau. En général, plus la température de l’eau est élevée, moins elle est capable de dissoudre les gaz. Un cours d’eau peut ainsi subir une diminution drastique de la teneur en oxygène dissous dans ses eaux, ce qui peut avoir des conséquences néfastes sur la faune et la flore aquatiques.
Par ailleurs, la température de l’eau est une variable importante à la fois pour l’agriculture et pour l’industrie et même dans le secteur de l’énergie.
À cet égard, les centrales électriques/nucléaires, par exemple, utilisent de grandes quantités d’eau pour refroidir leurs équipements. La température de l’eau « entrante » et celle de l’eau rejetée constituent donc un facteur majeur dans ce processus et peut avoir un impact non négligeable en termes de sécurité nucléaire.
La surveillance étroite des variations de température dans les cours d’eau et les lacs permet aussi de détecter de potentielles sources de pollution.
Enfin, à plus grande échelle, cette métrique est un des indicateurs essentiels pour évaluer les impacts du changement climatique sur les écosystèmes aquatiques continentaux.
Mesure de la turbidité
La turbidité d’un liquide fait référence à la présence de matières non dissoutes en suspension qui affectent sa transparence.
Dans un cours d’eau, les particules en suspension peuvent être soit d’origine naturelle (sédiments, algues, matières organiques, etc.) soit d’origine anthropique (polluants chimiques, déchets, etc.). Une augmentation de la turbidité peut de ce fait être un indicateur important de la dégradation de la qualité de l’eau.
La quantité de matière en suspension dans l’eau peut avoir un impact direct sur la santé humaine puisque des niveaux élevés de turbidité peuvent être associés à des risques sanitaires, comme des maladies d’origine hydrique. La mesure de la turbidité permet de détecter les risques pour la santé humaine liés à la consommation d’eau potentiellement contaminée (bactéries, virus, parasites et produits chimiques toxiques).
Il faut noter que les épisodes de crues et de sécheresse ont une influence directe sur le niveau de turbidité d’un cours d’eau. Lors d’une crue, les forts débits entrainent avec eux de grandes quantités de sédiments, de matières organiques et de terre arrachés au lit de la rivière, aux berges et aux terrains submergés.
À l’opposé, en cas d’épisode de sécheresse aiguë, notamment en période de canicule, lorsque l’eau s’évapore sous l’effet de la chaleur, les particules de matière en suspension se retrouvent concentrées dans la faible quantité d’eau restante. Dans certains cas, la turbidité peut alors s’élever de façon exponentielle.
La turbidité est un paramètre important pour de nombreuses applications, particulièrement pour le traitement de l’eau potable et le suivi des effluents industriels et municipaux. En mesurant la turbidité, il est possible de détecter rapidement les fluctuations de la qualité de l’eau et de prendre des mesures pour protéger l’environnement et la santé humaine.
Dans les semaines qui arrivent, et toujours dans le cadre du contrat qui nous lie à l’Agence de l’eau Adour-Garonne, une seconde série de tests portera sur la mesure de la turbidité par télédétection également. Ce sera donc la seconde métrique mesurée par les futures versions de nos micro-stations.
Les agences de l’eau et la mesure de la qualité de l’eau
En France, la mesure de la qualité de l’eau des cours d’eau est principalement assurée par les 6 agences de l’eau, qui sont des établissements publics chargés de la gestion de la ressource en eau.
Les agences de l’eau supervisent le réseau de mesure de la qualité de l’eau, qui comprend :
• des mesures sur le terrain
• des stations de mesure automatisées.
© www.lesagencesdeleau.fr
Lors des mesures faites sur le terrain, les échantillons d’eau sont prélevés manuellement pour ensuite être analysés en laboratoire.
Les stations de mesure automatisées, quant à elles, sont équipées de capteurs qui mesurent en continu des paramètres tels que la température, la turbidité, le pH, etc.
Les données sont ensuite transmises automatiquement aux agences de l’eau.
Ces données de qualité de l’eau sont utilisées pour évaluer l’état des cours d’eau, suivre les tendances, identifier les zones à risque et orienter les actions de protection et de restauration des milieux aquatiques.
Malheureusement, bien qu’essentielle, la mesure de la qualité de l’eau des rivières nécessite beaucoup de temps humain pour les prélèvements manuels et s’avère extrêmement coûteuse en ce qui concerne le matériel de prélèvement automatisé.
Ajoutons que si les dispositifs immergés (sondes, stations) sont d’une grande efficacité, ils sont aussi par définition particulièrement exposés face aux aléas des cours d’eau. Les épisodes de crue, la rigueur des intempéries, les impacts causés par les bois flottants, la glace, etc. sont autant de causes de pannes et de dérive dans la qualité des données recueillies.
C’est pourquoi l’ampleur des moyens humains et financiers nécessaires pour assurer leur entretien pèse lourdement sur le budget des agences de l’eau en charge de ces mesures.
Le coût du matériel, de son installation et de son entretien peut à lui seul largement expliquer pourquoi le nombre de capteurs aujourd’hui déployés sur le territoire français ne dépasse pas les 800.
L’approche vorteX-io : la télédétection
À l’opposé de ces capteurs immergés, l’idée de vorteX-io est de faire évoluer son réseau de micro-stations hydrologiques, principalement installées sur les ponts enjambant les cours d’eau, vers de nouvelles fonctionnalités.
En complément des mesures déjà effectuées (hauteur d’eau, vitesse de surface, prise d’images/vidéos) les micro-stations vorteX-io seront prochainement capables de mesurer la température de surface ainsi que la turbidité de l’eau.
Comme les micro-stations sont situées plusieurs mètres au-dessus de l’eau, elles sont par définition à l’abri des aléas subis par les capteurs immergés. Les mesures étant effectuées à distance de l’eau, on parle de télédétection.
Un autre avantage majeur des micro-stations vorteX-io est leur faible coût de revient puisqu’elles ne nécessitent pour ainsi dire pas d’entretien. En effet, grâce à leur conception unique, directement héritée du domaine spatial, leurs constantes vitales sont automatiquement surveillées, à distance et en temps réel. Une fois installées, aucune intervention humaine n’est plus nécessaire et leur fonctionnement est entièrement automatisé.
L’alimentation de la batterie interne est assurée par un panneau solaire. Cette autonomie en énergie assure sur le long terme leur fonctionnement interne, celui des instruments de mesures embarqués, mais aussi l’émission de la télémétrie et la réception de commandes, des mises à jour logicielles, etc.
Les avantages d’être situé à distance de l’eau sont nombreux, mais en contrepartie, cette méthode exclut notamment la possibilité de réaliser des prélèvements d’eau.
Les mesures chimiques (pH, conductivité, taux d’oxygène dissous, nutriments, métaux, bactéries, pesticides, etc.) resteront donc l’apanage des instruments immergés.
Comment mesurer la qualité de l’eau sans être immergé ?
La télédétection de la température de surface de l’eau est réalisée dans l’infrarouge thermique grâce aux capteurs embarqués dans la nouvelle version de la micro-station vorteX-io (v.2.1).
La validation de la « mesure vorteX-io » en conditions réelles se déroule depuis le début de l’année 2023 sur le Girou, un petit cours d’eau de Haute-Garonne. Le site correspond aux critères de validation nécessaires puisqu’il était déjà équipé de sondes opérationnelles immergées, dédiées à la mesure de température et utilisées par l’Agence de l’eau Adour-Garonne. De ce fait, c’est l’endroit idéal pour comparer les mesures effectuées par les deux dispositifs.
La réalisation de mesures à distance s’avère plus complexe que celles faites grâce à des instruments immergés. Ainsi, une des problématiques à résoudre pour obtenir des mesures fiables avec les caméras thermiques, réside dans le fait qu’il faut exclusivement prendre en compte la surface de l’eau. Pour éviter que les calculs ne soient faussés par la température d’éventuels objets émergés (berges, obstacles flottants, pont et autres structures fixes …), un « masque logiciel » doit être appliqué pour ne garder que les parties de l’image qui correspondent à l’eau.
En appliquant aux images un algorithme de Deep Learning spécialement développé par nos équipes, et appliqué sur les images optiques, on peut concentrer les mesures uniquement sur la surface de l’eau.
Un calcul de moyenne est ensuite appliqué pour obtenir des résultats précis.
Les images ci-dessous détaillent le processus de création des « masques d’eau logiciels » utilisés lors des calculs de la température de surface.
Conclusion
Les résultats obtenus concernant les mesures de la température de l’eau sont d’ores et déjà très encourageants. La R&D est toujours en cours pour ce qui est de la mesure automatique de la turbidité par télédétection et nous vous présenterons les résultats sous peu.
Ces innovations permettront rapidement de mesurer la température de surface et la turbidité des cours d’eau en temps réel, à moindre coût et à une échelle jusqu’ici inenvisageable.
Déjà à la pointe des mesures hydrologiques pour ce qui est des données quantitatives sur les cours d’eau, vorteX-io s’apprête donc à compléter l’étendue de son offre en y ajoutant la dimension qualitative. Ces innovations s’inscrivent dans notre objectif de créer la première base de données hydrologiques au niveau européen, consultable via Maelstrom®, notre plateforme dédiée à l’hydrologie.
Protection de la biodiversité des zones humides, surveillance les sources potentielles de pollution, meilleure gestion de la ressource en eau (consommation et assainissement), évaluation les impacts du changement climatique sur les systèmes hydrologiques et les écosystèmes : les enjeux de ces données de qualité de l’eau sont nombreux et de plus en plus d’actualité.
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